La première audience de l’affaire s’est ouverte le 6 décembre dernier à Yaoundé
Au Tribunal militaire de Yaoundé jeudi le 6 décembre dernier, Julius Sisiku Ayuk Tabe, la tête de proue de la contestation séparatiste dans les régions anglophones du Cameroun a assisté comme 9 de ses congénères à l’ouverture (enfin) du procès qui les oppose à l’État Camerounais. Si des sources parlent des motifs » de défaut carte nationale d’identité, incitation à la révolte, propagation de fausses nouvelles etc », les avocats des prévenus eux attendent toujours d’être officiellement notifié des charges qui pèsent contre les 10. Ce silence des autorités judiciaires camerounaises est critiqué par les conseils des meneurs de la contestation sécessionniste. » On n’a pas eu le dossier de l’accusation . comment on va défendre nos clients ?! » tempêtait la veille du procès, Me Fru John NSOH, l’un des coordonnateurs du Groupe de près de cent avocats de Sisiku Ayuk et Compagnie. Le procès s’ouvre après 11 mois de détention des séparatistes dans diverses prisons de la capitale camerounaise. Ils avaient été arrêtés du Nigéria, d’où ils pilotaient les attaques armées contre les symboles de l’Etat du Cameroun à travers leurs adeptes dans les deux régions anglophones du pays, au mois de Janvier 2018 et transférés au Cameroun. Une longue attente prévue par une loi récemment adoptée sur la lutte contre le Terrorisme au Cameroun et « qu’on ne peut voir que dans un régime dictatorial comme celui ci » , tance Me John Fru.
Audience
Au tribunal militaire de Yaoundé le 6 décembre dernier, Sisiku Ayuk Tabe et les 9 autres coaccusés sont apparus l’air plutôt sereins. Drapés dans des gandouras traditionnels reflétant leur Manyu natal(Ndlr, Manyu, département du Sud Ouest du Cameroun dont sont originaires la plupart des séparatistes et l’un des fiefs de la contestation), les accusés sont arrivés au tribunal sous forte escorte des forces de sécurité. Les entrées du tribunal étaient fortement filtrées. Pas de téléphones. Les Caméras de télévision indésirables même aux alentours de la juridiction. A l’étape de l’identification devant le tribunal, les mis en cause ont sorti pour les uns des cartes d’identité de « l’Ambazonie » ( État imaginaire dont rêvent fonder les séparatistes dans les régions Nord Ouest et Sud Ouest du Cameroun) pour les autres du « Southern Cameroon »( appellation des régions anglophones du Cameroun avant la réunification). La présidente du tribunal militaire de Yaoundé, la Colonelle Abega Mbazoa a déclaré qu’elle ne reconnaît pas ces » États » et a ordonné la poursuite de l’audience. Le commissaire du Gouvernement pour sa part a présenté la liste des témoins au tribunal. Liste présentée la veille du procès aux avocats des séparatistes. C’était la pomme de discorde entre le tribunal et les avocats des mis en cause qui ont rappelé que le code de procédure pénale prévoit la présentation de la liste des témoins 5 jours avant procès. L’observation a été rejetée par le tribunal militaire de Yaoundé. »Si le commissaire du gouvernement nous sert la liste des témoins la veille de l’audience, c’est une violation grave de la loi. Malgré cela, le tribunal dit qu’il ne peut pas déclarer ça irrevable, on est dans quel pays? » dénonce Me Christopher NDONG MVEH, Membre du collectif des Avocats de Sisiku Ayuk Tabe. Le procès des séparatistes a été renvoyé au 10 janvier 2019 pour l’ouverture des débats dans le fond. Un procès scruté par la communauté internationale qui appelle au respect des droits des accusés. Dans le même temps, le jour de la première audience a été marqué par des violences dans les régions anglophones ou les affrontements continuent entre l’armée et les combattants sécessionnistes. Des tensions qui ont déjà fait près d’un millier de morts côté civils et forces de sécurité depuis près de deux ans.
Par : Donald Brice Kamgang