La ministre rwandaise des affaires étrangères a reçu vendredi l’onction des chefs d’Etat et de Gouvernement réunis au 17e sommet de L’Organisation Internationale de la Francophonie d’Erevan en Arménie
Sa nomination ne faisait l’ombre d’aucun doute. Louise Mushikiwabo, a été désignée au consensus par ses pairs comme Secrétaire Générale de l’Organisation Internationale de la Francophonie à l’issue des Assises du 17e Sommet de l’OIF. Ses priorités, tout en poursuivant la défense et la promotion des valeurs de l’Organisation Internationale de la Francophonie, elle compte dédier son mandat à la recherche de solutions concrètes face aux problématiques qui sont communes à tous les Etats et Gouvernements membres de l’institution. Son projet pour l’OIF s’articule autour de 4 axes : le rayonnement de la langue française, la pertinence de la Francophonie, l’emploi des jeunes, l’échange de bonnes pratiques.
Une élection qui fait grincer les dents
Si Louise Mushikiwabo a pris les rênes de la Francophonie, son élection est critiquée car le Rwanda n’a pas la réputation d’un pays très francophile. En 2008 le français a été remplacé par l’anglais comme langue obligatoire à l’école. En conférence de presse après son élection Louise Mushikiwabo a dit que cela n’était pas un obstacle à la Francophonie « Quelque fois J’ai l’impression qu’on reproche au Rwanda d’embrasser plusieurs langues qui pour nous est une richesse. Le rayonnement de la langue, l’enseignement de la langue française, la cohabitation très pacifique du français avec d’autres langues, la place du français dans un monde multilingue, bien sûr ça va aussi concerner mon propre pays le Rwanda ». Comme soutien de poids, Louise Mushikiwabo a pu compter sur la France. Avec cette nomination, certains ont reproché à la France d’instrumentaliser l’OIF pour améliorer ses relations avec le Rwanda alors que le pays n’est pas forcément un exemple des principes fondateurs de la Francophonie comme le respect des droits de L’homme. Présent au Sommet de la Francophonie à Erevan, le président français, Emmanuel Macron rassure que cette élection pourrait changer la donne quant au respect des règles de la démocratie et des droits de l’homme au Rwanda « Je suis convaincu que par une exigence de tous, par l’impression des pairs, on l’a fait sur plusieurs cas concrets ces derniers mois, on peut obtenir des résultats, cette nomination oblige en quelque sort. Et la démarche qui a toujours été la mienne c’est bien plus travailler avec l’ensemble des Etats, essayer de promouvoir ces valeurs pas en donnant des leçons à l’extérieur mais en arrivant, en montrant, convainquant que donner la responsabilité, faire confiance oblige à changer soi-même ». Une réaction presque similaire à celle du président rwandais, Paul Kagame également présent aux travaux : « Pourquoi pensez-vous qu’il y ait qu’un seul paramètre déclencheur ici. Peut-être qu’il y a toute une série de paramètres au Rwanda comme son propre système de gouvernance. Et pendant huit ans Louise Mushikiwabo était ministre des affaires étrangères, je préside l’Union Africaine(…) je suis convaincu qu’on doit lui donner des fonds, des crédits ». Des promesses qui attendent encore d’être réalité et surtout de voir si la Francophonie va véritablement se transformer sous l’égide de Louise Mushikiwabo. De son côté la sortante Michaelle Jean a mal pris sa défaite affirmant « qu’elle avait été victime d’un grave arrangement entre Etats »
Sa campagne
Pour y arriver Louise Mushikiwabo a mouillé le maillot en multipliant des rencontres avec des dirigeants du monde. Au Luxembourg au mois d’octobre après avoir échangé longuement avec son homologue ainsi que le premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel sur l’avenir de la Francophonie et sur ses aspirations, ce dernier lui réitère son souhait de voir la désignation de la future Secrétaire Générale de l’OIF le 12 octobre 2018 à Everan, se réaliser dans la tradition de l’Organisation, à savoir, sur le principe de consensus. Selon lui le consensus est la base même d’une bonne coopération entre les Etats membres et le principe fédérateur sur lequel l’Organisation doit s’appuyer en toutes circonstances. Le 30 septembre 2018 à New-York pour les Assemblées Générales des Nations-Unies, la ministre rwandaise des affaires étrangères a eu l’occasion de rencontrer plusieurs de ses homologues des pays membres de la Francophonie. Organisées en marge des réunions de la Conférence annuelle de l’Onu, ces rencontres ont été cruciales pour la candidate africaine dont l’une des priorités est replacer l’OIF sur l’échiquier mondial. Un peu plutôt en visite au pays des Cèdre, le Liban, Louise Mushikiwabo vient clôturer une visite exceptionnelle à Beyrouth. Il s’agit de sa première visite officielle au Liban, unique pays membre de la Francophonie dans la région du Moyen-Orient. Elle y a été reçue par les plus hautes autorités du pays. Elle avait tenue à rendre visite au Liban dans le cadre de sa campagne de par sa position unique dans la région mais surtout à cause des relations ancestrales existant entre la Liban et le continent africain. Elle clôture une dernière série de visites en Afrique à un mois exactement du Sommet de la Francophonie. Du 7 au 11 septembre, elle s’est ainsi rendue dans une série de pays africains du Nord et de l’ouest. Son intention première étant de présenter aux différents chefs d’Etat son programme pour l’OIF mais également leur soutien de les remercier pour leur soutien exprimé lors du dernier sommet de l’Union Africaine à Nouakchott. Les échanges avec chacun d’entre-deux se sont avérés d’une grande utilité pour la candidate, recueillir les ressentis des uns et des autres par rapport à l’Organisation International de la Francophonie ainsi que leurs attentes, souhaits ou préoccupations.
Au terme d’une campagne de plus de deux pendant laquelle elle aura visité plus d’une vingtaine de pays membres de la Francophonie, Louise Mushikiwabo a pris toute la mesure de l’importance de cet exercice diplomatique qui aura permis à sa vision de se préciser et de s’affiner en fonction des préoccupations premières des Etats membres. Selon elle la quête de la pertinence de l’OIF ne peut porter de fruits qu’avec un secrétaire générale au service des Etats membres, de tous les Etats membres. Raison pour laquelle elle aura mis un point d’honneur à aller vers les Etats, pour les écouter et recueillir auprès d’eux conseils et perceptions. Au fil des rencontres le constat est sans équivoque : plusieurs pays se sentent déconnectés de l’OIF et ne demandent qu’à être davantage impliqués et engagés. Les réunions ont permis à la candidate de se faire une idée plus précise par rapport à l’OIF .Notamment en ce qui concerne la promotion de la langue française. Un défi que Louise Mushikiwabo entend relever pendant les quatre années de son mandat.
Par : Sandrine BABO